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Pourquoi nous ne sommes pas gaullistes !

samedi 22 juin 2019, par LA SOCIALE

La mode du côté des souverainistes est de faire l’apologie du général De Gaulle. Sans doute un grand homme à qui nous devons d’avoir su, avec beaucoup d’habileté, incarner l’esprit de résistance quand tout semblait perdu. Sans doute encore aujourd’hui les vrais gaullistes (qui ne sont plus guère qu’une poignée) peuvent-ils être des alliés précieux dans la lutte contre l’européisme et les euroïnomanes. Mais, nous, rédacteurs de « La Sociale », nous ne sommes pas des gaullistes et nous ne nous réclamons nullement de la politique étrangère du général De Gaulle, même si cette politique étrangère serait, si on l’appliquait aujourd’hui, un moindre mal comparé à celles qu’ont menées avec constance tous les successeurs de De Gaulle.

Nous ne sommes pas gaullistes parce que le « héros de la Résistance » est aussi l’homme qui a sauvé l’État de la révolution socialiste qui menaçait en France en 1944. Il a organisé la continuité de l’appareil d’État, notamment police et magistrature, entre Vichy et la Quatrième République et il s’est farouchement opposé à l’épuration de cet appareil. Il s’est appuyé pour ce faire sur l’accord avec les socialistes et les communistes. L’application du programme du CNR a été rapidement enrayée, De Gaulle et le MRP retrouvant vite leurs esprits en prenant la défense des intérêts du capital, même si pour cela, il a fallu faire quelques sacrifices. Le RPF qui fut fondé en 1947 était clairement un parti de la bourgeoisie avec comme objectif premier la mise en œuvre du discours de Bayeux et la liquidation du parlementarisme que De Gaulle jugeait trop faible pour défendre de manière conséquente les intérêts de la classe dominante.

Nous ne sommes pas gaullistes parce que nous continuons de considérer que la constitution de 1958 est dans son essence de type bonapartiste plébiscitaire et qu’elle interdit une expression politique sérieuse des classes opprimées. Même si après De Gaulle, son caractère autoritaire et la concentration du pouvoir ont encore été renforcés, ce sont les mauvaises habitudes de 1958 qui ont fait école. Cette constitution était cependant celle d’un bonapartiste bâtard puisqu’elle incluait une dose de parlementarisme (articles 20 et 49) que Jospin et Chirac par leur double forfait de 2002 ont éliminée (mandat de 5 ans du président et inversion du calendrier électoral). Nous ne sommes pas gaullistes parce que nous n’oublions pas que les premières attaques frontales contre la sécurité sociale sont les ordonnances de 1966 et les premiers coups portés contre la laïcité sont les lois Debré de 1959 et que la mise en œuvre de la déréglementation bancaire date des lois Debré-Haberer de 1966 et 1969…

Nous ne sommes pas gaullistes parce que nous ne nous réclamons pas non plus de la politique étrangère du général De Gaulle. De Gaulle a sorti la France du commandement intégré de l’OTAN, mais la France est restée dans l’OTAN et dans l’Alliance Atlantique. Il a manœuvré pour redonner à la France des marges d’action et une certaine indépendance (reconnaissance de la Chine, politique de détente avec la Russie, appel aux non-alignés) mais cette politique est toujours restée dans le cadre de l’alliance américaine. Un allié incommode, mais un allié sûr.

Nous sommes pour la souveraineté nationale et sur ce plan nous sommes prêts à frapper avec les gaullistes. Mais pour nous, la souveraineté nationale est le moyen de régler les comptes avec la domination du capital, nullement le moyen de mettre en place l’alliance capital-travail, c’est-à-dire la subordination du mouvement ouvrier aux intérêts du capital, ce qui fut la ligne constante de gaullistes.