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Action et réaction ...

… Loi de la physique et de la politique.

dimanche 15 septembre 2019, par Jacques COTTA

En toute logique, Emmanuel Macron a pris l’initiative de l’action en cette rentrée politique de septembre. A Biarritz, durant le G7, entre tirage de portrait avec les grands de ce monde et amabilités délivrées avec le président du Brésil Bolsonaro concernant Madame, le président de la République a confirmé ses intentions comme s’il se trouvait en terrain vierge, face à une population impatiente de voir les « réformes » se poursuivre, comme si l’été, pourtant marqué par des mobilisations renforcées de semaine en semaine dans tous les hôpitaux de France à partir des urgences, avait constitué une trêve salutaire.

Le président de la république a indiqué la volonté gouvernementale, conformément aux desiderata du capital financier et des institutions européennes, de « traiter » le dossier des retraites. Au nom de « l’équité » comme toujours, il s’agit de liquider les régimes spéciaux sur la base du rapport Delevoye qui prévoit la mise en place d’un « système par points ». Sans entrer ici dans les détails, il s’avère que ce choix aura des répercussions très négatives sur les retraites pour la plupart de nos concitoyens. L’action gouvernementale n’a pas manqué de provoquer la réaction salariale. Depuis 2007 nul n’avait vu une grève d’une telle ampleur à la RATP qui pourrait bien préfigurer les semaines à venir, à condition que les organisations syndicales cessent avec la stratégie des journées d’action qui succèdent aux journées d’action, et s’engagent dans une logique unitaire, posant la question de la grève générale et du blocage du pays.

Les médias mettent toute leur énergie à soutenir un équilibre instable qui risque d’être à nouveau ébranlé par le mécontentement général. France télévision dans ses journaux télévisés se surpasse. Ainsi apprend-on que « le cadeau (sic) fait par le président de la république au lendemain du mouvement des Gilets jaunes commence à porter ses fruits ». Il n’y aurait plus de préoccupations salariales dans le pays, plus d’inquiétude pour finir les fins de mois. Les mois de mobilisations pour la justice sociale et démocratique qui ont envahi la France et ses carrefours, dans ses villes et villages, depuis le 17 novembre dernier, n’auraient été qu’une parenthèse enfin refermée. L’autisme n’a pas de limite.

Alors qu’ils flattent un pouvoir qui pourtant en coulisse est le premier à douter de lui et de ses capacités à avancer sans péril, alors qu’ils font silence radio sur les dernières péripéties du premier cercle de la Macronie, Ferrand succédant pour une affaire de mutuelle aux queues de homards géants de De Rugy, les différents médias se retrouvent aussi pour déverser une haine féroce sur Jean Luc Mélenchon qui rappelle ce tir tendu lors de la présidentielle, lorsque la peur panique s’emparait des cercles dirigeants à la vue du responsable de la FI faisant campagne sur une ligne républicaine et sociale. Aujourd’hui pourtant la situation a changé. Jean Luc Mélenchon laisse les communautaristes de la FI vilipender scandaleusement, comme le montre dans nos colonne l’article de Denis Collin, "Solidarité avec Henri Pena-Ruiz", coupable à leurs yeux de défendre la laïcité au détriment notamment de l’islam politique, accusé de façon ignominieuse de « racisme », et pourtant Mélenchon demeure dans la ligne de mire. A croire que les symboles, même datés, sont sujet d’inquiétude…

En réalité ce qui inquiète a toujours le même nom, la même dénomination. Il s’agit de la « lutte des classes » qui est inscrite dans l’évolution même de la société. Les mesures prises par le gouvernement servent tout logiquement des intérêts qui contraires aux exigences de la majorité suscitent des réactions massives, souvent dispersées, qui n’aspirent qu’à se rassembler. C’est dans ce cadre que la « cartouche présidentielle », plus de deux ans avant l’échéance, est tirée.

Alors que les problèmes auxquels le peuple français est confronté demandent réponse immédiate, alors la fin de mois concerne pour des millions chaque mois, alors que les retraites, c’est aujourd’hui, alors que les hôpitaux, les urgences, la santé, ne peuvent attendre, alors que sur tous les sujets vitaux les délais ne peuvent être allongés, voilà que dans un consensus général impliquant médias, responsables politiques, commentateurs, éditorialistes, sondeurs, le sujet serait de savoir comment dans plus de deux ans se dérouleront les élections présidentielles. Et alors que nul ne peut prévoir en deux ans ce que les forces sociales pourront produire, voila que toutes les spéculations les plus folles veulent enfermer le débat, comme le souhaite Emmanuel Macron lui-même, dans un éventuel affrontement Macron Le Pen, la seconde étant baptisée recours pratiquement « providentiel » pour défaire le pouvoir en place. Cette « culture » politique est hors-sol, en dehors du temps et en cela grotesque, alignée totalement sur les institutions de la 5ème république pour qui la désignation du Bonaparte du moment doit permettre de résoudre les questions politiques de la Nation.

L’opposition à Emmanuel Macron et sa politique se cherche. Elle existe mais est divisée, éparpillée, inefficace à moins de trouver les voies et les moyens de s’unifier. La volonté d’un référendum sur la question d’ADP, comme l’indique « l’appel de Breil-sur-Roya » que nous publions dans cette lettre, correspond à cette exigence d’unification qui pointe majoritairement. Elle est à l’opposée des perpétuelles journées d’action syndicales qui se succèdent, se regardent, se croisent sans jamais se rejoindre. A les écouter les français veulent un « tous ensemble » dont dépend l’efficacité. La constitution exige 4,7 millions de signatures pour obtenir le droit de se prononcer. Le seuil est tellement élevé que le président de la république, dans un excès de sagesse et de justice, avait envisagé dans sa dernière grande conférence de presse de l’abaisser à 1 million. Sage proposition qui vraisemblablement ne sera pas suivie d’effet, le président n’ayant ni intérêt, ni intention, de donner le fouet pour se faire battre.

Alors, 4,7 millions ? Si tout le monde s’y mettait -ce qui aujourd’hui est loin d’être le cas- pourquoi pas ? Difficile mais possible. Chiche !