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Le blabla de Glasgow

La COP est pleine

dimanche 21 novembre 2021, par Robert POLLARD

Le Monde diplomatique d’octobre 2021 nous donne à regarder cette réalité (lui-même citant Le Monde)  : le salaire de Lionel Messi du PSG serait de 40 millions d’euros par an, considéré à son niveau plancher ne tenant pas compte des à-côtés publicitaires ; le budget annuel du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)s’élève à 6 millions d’euros par an. « Ainsi, le salaire d’une star du football correspond aux ressources de presque 7 années d’une institution qui comprend 195 États membres, coordonne le travail de centaines de scientifiques internationaux et assure une fonction essentielle dans la compréhension des causes et conséquences du réchauffement climatique.  » (Marc Billaud directeur de recherche au CNRS). En extrapolant il est instructif d’étudier les correspondances possibles et surtout impossibles, avec le salaire moyen d’un travailleur français ou étranger, les ressources accordées aux hôpitaux et particulièrement à leurs salariés… constat tout aussi destructif qu’instructif pour l’entendement.

Libération n’est pas en reste, dans un autre registre, le 8 novembre 2021 : « Hausse brutale de la faim dans le monde. », soit 45 millions d’êtres humains qui sont à la limite de la famine — quel est la signification des “limites“ quand on parle d’avoir faim au point d’en crever ? Mourir de faim au sens littéral, est une affaire très personnelle, pour une fois il serait bon d’en explorer les profils, la question du “pouvoir d’achat“ est au premier rang de l’observation c’est ce qu’il y a de plus gênant. Ici le quotidien attribue l’essor de la faim dans le monde, à l’Afghanistan. Étrange démarche qui consiste à confondre la cause avec l’effet. Qui a réduit ces contrées, ce pays, ces populations à de telles extrémités ? Et, surtout, pourquoi ? Qui prétendit “crever l’abcès“ quand il rendait malade, à en faire mourir, tout un peuple ? On n’oubliera pas l’URSS aux temps accomplis du stalinisme. Lutter contre le terrorisme fut annoncé avec cette morgue et cette hypocrisie propre aux puissants, or le taux de morbidité qui lui est imputé dans le monde, y compris au Moyen-Orient, ne semble pas avoir reculé… bien au contraire, les Irakiens, notamment, ne vous diront pas le contraire… l’Afrique… l’Asie… l’Australie… et l’Europe enfin, non plus.

De quoi a-t-on peur ? Seraient-ce les bases incertaines du « FOMO » qui supporteraient notre angoisse ? Le FOMO — que nous pourrions écrire en Faux Mot — serait la dernière trouvaille supposée américaine : “la peur de rater quelque chose“, « fear of missing out » (et Fomo devint un concept !), et ce serait à partir de là que les plates-formes numériques trouveraient leur essor, leur carburant en les assurant d’une curiosité jamais démentie grâce au renouvellement infini des réponses aux questions même les plus saugrenues, les “wokes“ seront de la fête sans doute. La température sera-t-elle contenue à 1,5°C d’ici la fin du siècle ? Oui si… mais non car… Car ils s’en fichent les ténors du pouvoir réunis à Glasgow. Comme leur ont-ils fait savoir, les jeunes ne s’y sont pas trompés : bla bla bla. Demain nous raserons gratis, plus gratis que jamais, ou plutôt jamais gratis autant qu’il sera possible de se faire un pognon de dingue sur la nouvelle révolution numérique et climatique, puisqu’ainsi les deux semblent vouloir marcher ensemble. Et ce, sans s’inquiéter des conséquences déjà pointées par les spécialistes grincheux d’une production de CO2 augmentée grâce à la surchauffe informatisée et la voiture électrique. Ce qu’il faut de destruction, de farfouilles en terres étrangères pour construire une batterie, mille batteries, des millions et milliards qu’il faudra détruire on ne sait trop comment dans le « respect de l’environnement  » — faux mots…

L’essentiel semble être de trouver les mots justes qui permettent de détourner la compréhension immédiate et circonstanciée du surgissement de l’absurde et de l’improbable. Comment comprendre l’apparition quasiment surréaliste d’un Zemmour candidat à la Présidence de la République ? Que rien ne prédestinait à un tel parcours — encore que cela ne soit pas un véritable contre-argument. Plusieurs hypothèses dont celle-ci, que personnellement je retiens : affaiblir l’extrême droite tonitruante pour ne laisser passer que les bien peignés du genre, Elle et Lui, metteuse en scène, acteur d’un seul rôle qu’il a fini par connaître sur le bout des doigts maquillé dans l’antichambre patronale et financière avant de se rendre sur scène. Ils s’en méfient mais personne ne semble vraiment faire l’affaire mieux que Jupiter et Junon.

Ce couple et la politique qui l’accompagne, sont mariés à la Cop26 et à toutes celles qui lui succéderont, comme le pâle scootériste qui les a précédés s’était acquitté d’une Cop 21 parisienne brillamment célébrée. Affaires de bla bla plus ou moins terne, plus ou moins ripolinée. Ils attendent la fin du monde de pied ferme sans même avoir pris conscience de leur propre existence dans CE monde !

Ainsi que l’écrit Marc Billaud* dans Le Monde diplomatique d’octobre à propos des écarts fabuleux entre riches et pauvres « La disparité des moyens ne se résume pas à une question économique. Elle reflète aussi l’échelle des valeurs propres à notre société. ». C’est précisément pour cela qu’on ne peut plus se « contenter de ce que l’on a » pour se rassurer (voir se consoler) en évoquant l’Autre formellement, le moins chanceux, le moins riche que soi, celui qui ne cracherait pas sur la dernière bouchée que nous aurions refusé d’avaler à la fin du repas… celui qui n’a plus personne derrière lui, même pour lui creuser une tombe.

Robert, un 18 novembre…

{{}}* Directeur de recherche au CNRS rattaché au Centre de recherche en Cancérologie de Lyon. L’auteur s’exprimait ici en son nom et non celui du CNRS