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Cravates de NUPES

lundi 1er août 2022, par Jacques COTTA

La cravate a durant le mois de juillet défrayé la chronique médiatique. Il a suffi qu’Eric Ciotti, député LR des alpes maritimes, reproche « une tenue débraillée » à ses collègues de la FI pour que ceux-ci lui renvoient sa cravate en pleine figure. À entendre tout ce beau monde, la tenue vestimentaire aurait valeur de programme. Jeans troué, chemisette, ou simple polo à gauche. Costard cravate à droite. Un peu comme il y a une cinquantaine d’années où les convictions étaient affichées par l’allure de la tignasse, crâne rasé pour les « fachos », mèches abondantes pour les gauchistes de service qui donnaient à Johnny Hallyday le titre d’un de ses succès, « cheveux longs idées courtes »…

Il y avait la cravate en bois, celle qu’on ne porte pas, décorative, soignée, raffinée. Il y avait les cravates de toutes les couleurs. Il y avait la sombre, signe d’élégance, la fantaisiste, signe de liberté, il y avait simplement celle qui dès l’origine avait pour fonction de maintenir le col des chemises masculines. Il y avait la rouge aussi pour exprimer la passion, faire sa « déclaration ». Il y avait même la « cravate de notaire ». Et bien avec Ciotti et les députés de la FI, il y a maintenant la cravate parlementaire, tout simplement.

Cette polémique sur l’accoutrement est d’un ridicule d’autant plus achevé qu’elle recoupe quelques positions politiques qui méritent de sortir du cirque qui n’intéresse en réalité que les acrobates, jongleurs ou clowns qui y participent.

Tout est en effet bon pour faire diversion, et ce pauvre morceau d’étoffe revendiqué par les uns au nom de la rigueur, dénoncé par les autres comme marqueur social, vient remplir cette fonction.

Pendant qu’on parle de cravate, pendant que les « filles députées de la FI » font le buzz en exhibant leur lavallière, pendant qu’elles s’engouffrent dans la provocation en insistant d’ailleurs sur le sexisme et le machisme sous-jacent, une véritable obsession des féministes d’occasion, le gouvernement fait son petit bout de chemin. Il fait passer sa « loi sur le pouvoir d’achat », véritable cautère sur une jambe de bois, il affiche la couleur sur les retraites, il légalise l’opération décriée hier du cabinet MacKinsey qui avait empoché des millions d’euros pour des études que l’administration publique aurait pu mener à bien dans des domaines aussi variés que le montant des APL, la vaccination contre le COVID, le passe sanitaire, la réforme des retraites ou encore la reprise des transports publics après le confinement.

En effet, le gouvernement dit aujourd’hui avoir la volonté de « limiter » les sommes que l’État est autorisé à allouer à ces cabinets privés. En réalité, sous couvert d’une limitation des dépenses, le Gouvernement et le Président de la République entendent inscrire dans les textes le droit de l’État à faire appel, avec les fonds des contribuables, à des cabinets privés pour des missions qui relèvent de la compétence la plus indiscutable de la haute Administration. Il s’agit, sous des prétextes fallacieux, d’une privatisation comme on n’en avait jamais vu, la privatisation de l’État. Ce projet est de toute évidence une avancée majeure vers la destruction de la Nation au profit d’intérêts privés comme en rêve l’actuel pouvoir.

Oui, mais la cravate nous dira-t-on.

Et bien pour revenir à la cravate et souligner une fois encore le ridicule de cette polémique, il n’est pas inutile de rappeler que Jean Jaurès, à l’assemblée nationale comme dans la rue, au sein des foules ouvrières, avait bien le cou noué pendant qu’aujourd’hui les modernes, les patrons des GAFA ou encore les maîtres de Davos se la jouent décontractés, le col ouvert, la cravate remisée…

Jacques Cotta
Le 1er août 2022

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