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Conflit israélo-palestinien : quelques réflexions d’ordre général

mardi 22 mai 2018, par Denis COLLIN

On penser ce que l’on veut du projet sioniste ; l’État d’Israël est un fait politique que personne ne peut vouloir éliminer. C’est un État déplaisant : un État « théocratique » (il n’y a pas d’état civil en Israël), dont toutes les justifications renvoient à un conte pour enfants, celui de la diaspora et des Juifs qui retourneraient sur la « terre de leurs ancêtres », laquelle leur appartiendrait de toute éternité – en vertu d’un décret de Dieu. Toutes les justifications politiques des partisans et dirigeants israéliens s’ancrent dans cette idéologie religieuse, à peu près aussi sensée que l’idéologie des partisans du « Coran incréé » et autres sornettes de la même farine. Mais ces âneries, au même titre que « nos ancêtres des Gaulois », font partie de l’existence actuelle d’une communauté de vie et de destin qui est celle des Israéliens (et non des Juifs). Du point de vue du droit international, Israël a le droit à l’existence au même titre que n’importe quel État et le fait que cet État ait été fondé sur une violence colonisatrice ne change rien : à ce compte en effet, si Israël n’a pas le droit à l’existence en raison de son origine coloniale, on peut exiger le démentèlement d’à peu près tous les États existant au monde, qui ne diffèrent les uns des autres que par la plus ou moins grande ancienneté de la violence qui les a fondés ! On remarquera également qu’il n’a jamais existé d’État palestinien, le dernier État en date sur cette terre étant … le royaume de Juda qui disparaît au Vie siècle avant notre ère. Depuis cette région a toujours fait partie d’empires puissants (perse, romain, arabe, ottoman).

Exactement comme dans beaucoup d’autres cas, la colonisation a forgé une identité nationale des colonisés (pensons à l’Algérie). Les Palestiniens ont émergé comme sujet historique tout aussi fondé à revendiquer ses droits que la nation algérienne face à la colonisation française. Si on voulait leur appliquer les critères génétiques (ou pseudo-génétiques) que les Israéliens s’appliquent à eux-même, on pourrait faire remarque que les Palestiniens ne pas des Arabes (autre mystification) mais sans doute les authentiques descendants de Hébreux de l’Antiquité convertis par les envahisseurs arabes qui ont détruit l’empire romain d’Orient. Mais laissons-là cet argument. L’abus de la mémoire historique a trop souvent des fins idéologiques.

Si on se place du point de vue du droit international, la reconnaissance de l’État d’Israël va de soi … mais dans les limites de 1948. Tous les territoires annexés depuis l’ont été en dehors de toute légalité internationale. Aucune résolution internationale n’a reconnu l’occupation de la Cisjordanie et l’accord est à peu près général sur la formule « deux États », se reconnaissant mutuellement. Si la perspective est claire, elle semble cependant plus loin de toute réalisation qu’elle ne l’a jamais été. D’un côté, Israël, depuis l’assassinat de Rabin par un extrémiste israélien, s’est radicalisée. Les tendances racistes, hostiles à tout accord avec les Palestiniens se sont développées et le « camp de la paix » s’il reste important ne dispose d’aucune représentation politique sérieuse. Tout cela a été encore aggravé par la politique de Trump qui a décidé d’installer l’ambassade des USA à Jérusalem, pendant que Vladimir Poutine entretient avec Netanyahu les relations les plus amicales. D’un autre côté, les principaux États arabes de la région (Égypte et Arabie Saoudite) ont ouvertement abandonné les Palestiniens à leur triste sort, au profit d’une alliance stratégique avec Israël contre l’Iran. On est arrivé au point où nombreux sont les Palestiniens qui ne croient plus possible la construction d’un État palestinien et seraient prêts à être intégrés à Israël avec le statut des Arabes israéliens…

Le Hamas, on le sait, a été, à l’origine propulsé par l’Arabie Saoudite qui l’a financé et, en sous-main, par les services secrets israéliens qui se sont servi de ce groupe pour éliminer l’OLP (organisation non confessionnelle) et le Fatah. L’islamisation de la résistance palestinienne est une bonne affaire pour tous ceux qui cherchent des prétextes pour refuser ma constitution d’un État palestinien. Comme les talibans ou Alqaida, le Hamas fait partie de ces leurres utlisés par les puissances impérialistes pour garantir un « chaos soutenable » au Proche et Moyen Orient.

Pouvons-nous faire quelque chose ? Appliquons d’abord le vieux principe d’éthique médicale : d’abord ne pas nuire ! Ne pas jeter d’huile sur le feu. Refuser de se laisser embrigader dans les croisades meurtrières des uns et des autres et rappeler les questions de droit. Aider par tous les moyens tant les courants palestiniens laïcs que les partisans israéliens de la paix. S’en tenir là, c’est déjà bien.