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A l’école de Blanquer...

Revue de presse du 29 novembre 2020

mardi 1er décembre 2020, par Antoine BOURGE

Philippe Meirieu et la CGT Éducation quittent le Grenelle de l’éducation, le scandale du syndicat Avenir Lycéen et les contre-réformes honnies depuis ses débuts au ministère de l’Éducation nationale vont-elles enfin pousser Blanquer vers la sortie ?

Tout se joue autour du nouveau baccalauréat

Syndicats lycéens et financement inégalitaire

 L’Humanité :

« Il y a eu un vrai favoritisme. En 2019, Avenir lycéen, qui est une organisation de 30 personnes, a reçu 65 000 euros de subventions puis de nouveau 30 000 en 2020. En parallèle, l’UNL, présente dans 25 départements, a vu les siennes divisées des deux tiers, passant de 80 000 euros en 2019 à 20 000 en 2020. Les raisons d’un tel écart sont politiques. Si nos subventions ont baissé, c’est parce qu’on s’opposait notamment aux réformes Blanquer (…). »

 Mediapart :

« Après avoir reçu des alertes sur la nature des dépenses, le ministère explique que l’association a été « sensibilisée au bon usage d’une subvention publique ». Sans autre forme de conséquence, puisque le syndicat vient de recevoir pour cette année scolaire une nouvelle subvention de 30 000 euros, qui correspond à ce qu’elle avait demandé. »

Et plus loin :

« Officiellement « apolitique », le syndicat, créé en 2018, est composé d’une trentaine de membres actifs, dont plusieurs sont également adhérents aux Jeunes avec Macron. Sur ses réseaux sociaux, l’organisation relaie régulièrement la communication du gouvernement. D’autres syndicats lycéens, opposés aux orientations politiques de Jean-Michel Blanquer, ont vu, eux, leurs demandes de subvention largement revues à la baisse, voire rejetées, par le ministère ces deux dernières années. »

 Mediapart :

« Il a même fallu attendre les premières révélations de Mediapart pour que la rue de Grenelle suspende le versement prévu d’une nouvelle subvention de 30 000 euros, après celle de 65 000 euros en grande partie dilapidée pour frais de déplacement, hôtels et restaurants de luxe. »

Casser les oppositions à la réforme du baccalauréat

 Le Monde :

« Que des « relations privilégiées » aient pu se nouer entre ce ministère et des jeunes militants, cela n’étonne guère les historiens de l’école qui rappellent avoir vu se dessiner, dans les rangs des syndicats lycéens et étudiants, bon nombre de carrières politiques. Aucun, pourtant, n’a en mémoire la création d’un « syndicat maison ». Avec l’affaire Avenir lycéen telle qu’elle nous est contée, un cap symbolique serait franchi. »

 Mediapart :

« Alors en terminale, Martin*, qui venait d’être élu au conseil académique de la vie lycéenne (CAVL) du rectorat de Caen, a eu la surprise de recevoir, à son lycée, un tract pour adhérer au syndicat Avenir lycéen, qui venait tout juste d’être créé.

Le message lui a été transmis, selon son récit, par la conseillère principale d’éducation de son lycée au nom du proviseur vie scolaire (PVS), un fonctionnaire qui assure des missions de conseiller technique (notamment sur les sujets de vie lycéenne) auprès du directeur académique. Au dos du tract qui lui a été adressé (voir ci-contre), figure d’ailleurs l’annotation suivante : « De la part de M. Marie [le PVS – ndlr], transmis par le PVS pour vous, pour votre information. » « Ma CPE a servi de facteur pour le PVS, j’étais très surpris de recevoir un tract d’une organisation lycéenne », témoigne Martin, qui était alors âgé de 17 ans. »

Plus loin :

« Martin explique que, quelques jours plus tôt, lors de l’installation du CAVL le mercredi 12 décembre 2018, en pleine grève lycéenne contre Jean-Michel Blanquer, les échanges ont été « un peu tendus » entre les représentants lycéens et le recteur et le PVS David Marie. « Des élus affichaient clairement leur soutien aux blocages dans les lycées, moi je disais que ce n’était pas notre rôle de nous prononcer sur les blocages », raconte-t-il. Au cours de la réunion, Martin devient ainsi un allié du recteur et de son PVS avant, donc, de recevoir le fameux tract d’adhésion quelques jours plus tard dans son lycée. »

Et plus loin :

« Cet étrange épisode n’est pas sans rappeler un mail envoyé, le 9 décembre, dans l’académie d’Orléans-Tours. Révélé par Liberation, le message montre comment un membre du rectorat a donné des conseils à un lycéen sur la façon de communiquer sur les réseaux sociaux, en l’invitant à rajouter le mot-clé #Avenirlyceen à chaque fois qu’il poste « un message sur la vie lycéenne ». »

 Dans la La Tribune des Travailleurs n°266 du mercredi 25 novembre 2020 :

« La décision de bon sens qu’élèves et professeurs espéraient était le report des épreuves en juin (prévues les 15 et 16 mars 2021). Pour Blanquer, pas question. La mission que lui a confiée Macron est : 1°) de détruire le bac national qui donne accès à tous aux études universitaires de leur choix ; 2°) de le remplacer par Parcoursup, ce monstre qui, triant les élèves selon leur quartier, les empêche d’accéder aux études de leur choix. Dès lors, les algorithmes de Parcoursup démarrant le 8 avril, il était impératif pour Blanquer que les épreuves se déroulent avant. Ces épreuves, pseudo-vestiges du bac national, ne sont en réalité conçues que pour légitimer Parcoursup en lui apportant une caution « nationale ». Le bac Blanquer devient une composante de Parcoursup ! »

 Basta :

« Au lycée Joseph Desfontaines de Melle, « des étages ont été intégralement barricadés [par l’administration] lors de la passation des épreuves avec portes coupe-feu sanglées et sorties de secours condamnées », rapporte le comité de soutien des quatre enseignants.

« Nous sommes accusés de blocage d’établissement et de perturbation des épreuves pour avoir été en rassemblement et en grève les 10 janvier, 22 janvier et 3 février », explique Aladin Lévêque, cité par l’hebdomadaire Politis. « Il y a eu mise en danger d’élèves enfermés dans les salles d’examen et non évacués lorsqu’ils étaient en proie à des malaises. L’administration s’est rendue coupable de l’intégralité de ces actes, et ce sont les enseignants qui se retrouvent incriminés ! » , s’insurge le comité de soutien. »

Et plus loin :

« « En sanctionnant nos collègues, la rectrice et le ministre Blanquer s’attaquent tout simplement au droit de grève, qui est un droit constitutionnel ! », dit le syndicat Sud éducation. « L’affaire des 4 de Melle est devenue emblématique de l’acharnement répressif que subissent, dans l’éducation nationale, les personnels qui osent contester les réformes », renchérit le comité de soutien, qui demande l’annulation des sanctions. Les quatre enseignants ont l’intention de les contester devant la justice. »

 RT France :

« Dans une longue enquête publiée le jour-même, Libération assure ainsi que cette structure, créée en 2018, a germé Rue de Grenelle dans l’entourage proche de Jean-Michel Blanquer, « pour servir la communication du ministre, et surtout rompre tout dialogue avec les syndicats lycéens » opposés à ses réformes, notamment celle du bac. »

Un ministre inique et ambitieux contre l’école

Un projet global de déstabilisation de l’institution

 Basta :

Créée en 2001 pour « obtenir une amélioration du système éducatif français », l’association SOS Éducation est proche de la Manif pour tous et a la sympathie de Jean-Michel ­Blanquer : le jour de sa nomination au ministère de l’Éducation nationale, celui-ci a donné une « interview exclusive » à SOS Éducation, où il proposait de « passer par une dépolarisation puis par une repolitisation », et prônait « une offre scolaire autonome » (L’entretien a été retiré du site deux jours plus tard. Voir « En cachette, la sulfureuse association SOS Éducation efface tous ses liens avec le nouveau ministre de l’Éducation nationale », ici). L’association est également liée à la Fondation pour l’école. Dans un rapport publié le 29 octobre 2020, la Cour des comptes met en exergue les liens entre les deux structures, notamment par le biais de deux fondations abritées par la FPE, dont Aristote, créée en 2015 sous l’impulsion de SOS Éducation, et dont l’objet est de favoriser le « renouvellement des supports pédagogiques ».

 Le Monde :

« Les évolutions qui se dessinent sont positives pour tous ; ce doit être « gagnant-gagnant ». Si nous améliorons la médecine préventive, les mutations ou encore l’organisation et les conditions de travail, ça ne s’appelle plus des contreparties mais une évolution systémique. La période actuelle est propice à faire évoluer les pratiques, en s’inspirant des meilleurs exemples nationaux et internationaux. »

Revaloriser les salaires ? Non, des primes !

 Le Monde :

« Cette prime s’élèvera à 100 euros par mois pour ceux entrés dans l’enseignement en dernier (ceux du 2e échelon) à 36 euros par mois pour ceux qui ont plus d’ancienneté (à l’échelon 7). Un contractuel en début de carrière gagnera 54 euros nets de plus chaque mois. Cette prime s’ajoute, à la prime annuelle, déjà annoncée, de 450 euros pour les directeurs d’école. »

 Le Monde :

« J’avais déjà évoqué la première, celle d’équipement informatique, particulièrement attendue dans le contexte de la crise sanitaire qui conduit les enseignants à beaucoup travailler avec l’outil numérique. Cette prime, qui représente 150 euros net annuel pour un professeur dans le public, leur sera versée dès janvier 2021. »

Un ministre illégitime mais toujours en poste

 Libération :

« André Chassaigne. Le député du Puy-de-Dôme dresse ensuite la liste des griefs : « Votre ministre de l’Education est ainsi accusé d’avoir constitué un syndicat lycéen de toutes pièces pour promouvoir sa réforme du bac si décriée. […] Il est accusé d’avoir subventionné ce syndicat au détriment d’autres associations tout en lui offrant les moyens de son cabinet allant même jusqu’à rédiger ses communiqués. Il est accusé d’avoir manipulé de jeunes adultes dans le but de servir sa propre communication et ses propres intérêts. Tout cela est extrêmement grave (…). »

 RT France :

« Pour Julian Calfuquir, secrétaire exécutif national (SEN) du Parti de gauche (LFI), attaché aux questions de jeunesse, « Jean-Michel Blanquer cherche à détourner le problème initial. A la base, le ministre de l’Education détourne de l’argent public pour créer lui-même un syndicat lycéen pour soutenir sa réforme et faire la communication du ministère ». »

 Mediapart :

« Si la mainmise du Ministre sur cette association était confirmée, il pourrait alors s’agir d’un abus d’autorité (au sens de l’article 432-1 du Code Pénal) et d’une mise en péril de mineurs (au sens de l’article 227-22 du Code Pénal). Aussi ces faits pourraient confirmer l’hypothèse d’un trafic d’influence (au sens de l’article 432-11 du Code Pénal).

Si l’instrumentalisation syndicale de lycéens à des fins politiciennes se confirme, alors Jean-Michel BLANQUER devra en tirer les conséquences et démissionner. »

Un gourou et ses fidèles

 Atlantico :

« Convaincus que la lutte contre les inégalités de destin est la seule vraie réponse à la menace d’archipelisation qui pèse sur la société française, nous sommes admiratifs du volontarisme dont a fait preuve Jean-Michel Blanquer depuis son arrivée rue de Grenelle, dont la mesure emblématique est le dédoublement des classes de CP, CE1 et Grande section dans les réseaux d’éducation prioritaire qui bénéficie à plus de 320000 enfants cette année. Le plus grand crime de Jean-Michel Blanquer ne serait-il pas d’avoir mené l’une des politiques les plus progressistes dans le domaine éducatif depuis plusieurs décennies, bousculant ainsi les certitudes de ceux dont la paresse idéologique fait perdre de vue les intérêts de ceux qu’ils prétendent défendre ? »

 Le Monde :

« Au lendemain du déconfinement scolaire, l’ancien recteur s’est félicité devant ses proches : « On a fait du gymkhana avec un paquebot. » Manière de dire qu’il a bien manœuvré. »

Et plus loin :

« Le cabinet du ministre a fourni aux parlementaires des éléments de langage pour répondre sur le fond aux mises en cause publiées par Mediapart. Ces élus appartiennent pour la plupart au « fan-club JMB », une boucle Telegram lancée en 2018 par la députée LRM des Yvelines, Aurore Bergé. »

 Mediapart :

« Dans une enquête publiée par Libération ce vendredi, des anciens membres du syndicat ont par ailleurs confirmé la proximité du syndicat avec le ministère de Jean-Michel Blanquer, en expliquant s’être sentis « instrumentalisés » par la rue de Grenelle pour défendre les positions du pouvoir.

« Le ministère voulait qu’on entende dans les médias d’autres lycéens que les syndiqués. Il voulait donner de la visibilité aux élus des instances lycéennes, qu’il estimait plus légitimes. Sur le principe, pourquoi pas. Sauf que, et j’ai mis du temps à le comprendre, le vrai objectif du ministre, c’était de s’en servir pour exclure les autres syndicats », estime notamment l’une d’entre elles. »

 Mediapart :

« Onze jours après le rendez-vous avec le ministre, Avenir Éducation est créé le 13 juillet par une poignée de militants à Lyon. La structure, qui selon ses statuts a notamment pour objet « de favoriser le dialogue et les réflexions au sein des instances démocratiques et de représentation », est présidée par Franck*, qui est également militant des Jeunes avec Macron et était présent au ministère le 2 juillet.

Le 24 juillet, lors d’une assemblée générale, Avenir Lycéen vote à son tour pour la création et son intégration à Avenir Éducation. Juste après le résultat positif, Gaëlle* écrit à Jean-Michel Blanquer, en message privé sur Twitter, pour l’en informer. Le ministre répond à la militante : « Bravo ». »

La COVID, pas à l’école ?

 Le Monde :

« Les données communiquées par le ministère sont en effet remontées par les rectorats, lesquels sont informés par les établissements, qui ont deux moyens de savoir si un élève est positif : soit par les parents, soit par les agences régionales de santé. Or, la première voie dépend grandement de la volonté des parents de communiquer l’information. Contacté par Libération, le cabinet de Jean-Michel Blanquer explique : « Nous n’avons pas les moyens de les vérifier. D’autant que l’éducation nationale n’a pas le droit d’avoir des informations de santé d’élèves, par essence confidentielles, si elles ne sont pas données par les parents (représentants légaux), ou un certificat du médecin qui l’indiquerait, ou l’ARS. »

Et plus loin :

« En conséquence, les données du ministère sont très partielles et rendent peu compte de la dégradation de la situation dans les établissements scolaires que l’on observe depuis plusieurs semaines. Entre mi-septembre et mi-octobre, les nombres issus de la base de données Sidep de Santé publique France (SPF, qui recense les tests pratiqués et leurs résultats) ont comptabilisé entre 2,5 et 3 fois plus de cas positifs dans les 0-19 ans que le ministère n’a recensé de cas parmi les élèves.Mais lors de la deuxième semaine des vacances de la Toussaint, la différence est devenue spectaculaire, puisque le ministère a cette fois-ci communiqué un nombre treize fois inférieur à celui de SPF. »

Antoine Bourge

Le 29 novembre 2020