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L’Aquarius, les migrants, les bons sentiments et la catastrophe annoncée

mardi 12 juin 2018, par Jacques COTTA

Les commentaires sur l’Aquarius , bateau qui a recueilli en Méditerranée plus de 600 migrants, mélangent à loisir réflexions humanitaires et morales qui évacuent allègrement l’essentiel, le politique. Pour les uns l’Italie qui a refusé l’entrée de l’Aquarius dans ses ports fait la démonstration d’une politique d’extrême droite après les élections et la formation du gouvernement Lega-M5S. Emmanuel Macron et ses affidés y vont de leur petites phrases dans ce sens. Et l’Espagne dans sa décision de bien vouloir accueillir l’Aquarius dans un de ses ports démontrerait « la différence qui existe entre la droite et la gauche ».

Si on ne pose pas les problèmes à partir des réalités concrètes, on risque de préparer nous-mêmes les prochaines catastrophes électorales sur lesquelles il sera demain un peu tard de se morfondre.

Les réalités :

1/ L’Italie et la Grèce sont les seuls pays à avoir accueilli massivement. L’Italie depuis 2014 en est à 600 000 entrées sur son territoire. Il est donc un peu déplacé de lui faire des cours de morale.

2/ L’Espagne dans sa proposition marquerait donc une différence gauche ? Et la Corse, comme Talamoni, l’indépendantiste, qui propose l’accueil avec démagogie. Talamoni de gauche ? Et l’assemblée de corse, nouveau soviet de Méditerranée ?

3/L’accueil des migrants, une marque de gauche espagnole ? Mais regardons le fond de la politique du nouvel exécutif espagnol autour du PSOE. Peut-on raisonnablement parler de gauche et de droite lorsque qu’on voit le PSOE prendre le pouvoir sur la base d’une coalition large et déclarer dans la voix de son chef Pedro Sanchez représenter « le reflet du meilleur de la société » espagnole, constituer un gouvernement « paritaire, inter générationnel et ancrée dans l’UE » qui « devra avoir pour priorité principale de respecter les engagements européens » en matière de déficit public. Il a ainsi nommé la directrice du budget de l’UE Nadia Calviño à l’économie et Maria Jesus Montero aux finances. Assumant déjà cette responsabilité au gouvernement régional de l’Andalousie, celle-ci avait ainsi dû pratiquer dans sa région les coupes dans les dépenses publiques ordonnées par le gouvernement conservateur. Franchement une gauche comme cela, on la laisse volontiers où elle est, et on ne souhaite pas devoir se la payer au pouvoir.

4/ Pour en revenir aux migrants, la question de fond demeure.

a/ L’accueil systématique au nom de l’humanitaire est sans fin, et conduit inévitablement à une double catastrophe : catastrophe pour les pays d’origine qui se désertifient de forces vives indispensables à leur développement, catastrophe ici où on sait que cela a des limites objectives liées aux questions politiques et sociales notamment.

b/ Le traitement des demandeurs d’asile qui proviennent de pays où leur sécurité est menacée comme le traitement des mineurs isolés ne peut être celui de tous les migrants, au risque de détruire carrément les frontières et les nations, vieux rêve du capitalisme apatride. Si telle est la perspective, il faut la revendiquer. Mais cette orientation no-borders ne peut mener qu’aux catastrophes indiquées précédemment.

c/ L’accueil doit donc être limité. Il faut pour cela attaquer franchement les passeurs, interdire les passages qui reposent sur « la traite des migrants » aujourd’hui, comme hier sur « la traite d’esclaves » ou sur « la traite des femmes ». Et faire savoir qu’il ne suffit pas de risquer sa vie sur les flots pour se retrouver accueilli ici, de plus dans des conditions souvent déplorables…

d/ Il faut discuter sérieusement des aides au développement de pays saccagés soit par la guerre et nos armes, soit par le pillage dont ils ont été victimes. Avec un but et une exigence affirmées, le maintien des populations locales sur place. Cela d’autant plus que les migrants ne migrent souvent pas par plaisir…