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Macron, à poil

lundi 15 janvier 2024, par Denis COLLIN

Le remaniement gouvernemental démontre pour qui en doutait que « le roi est nu ». Macron n’a plus de gauche (Dussopt et Véran sont éjectés) et c’est maintenant « les traitres de droite et en même temps les traîtres de droite » pour parodier Mme Dati qui a rejoint le camp des « traitres de droite » en espérant sans doute y gagner son ticket pour les municipales de Paris qui auront lieu dans deux ans. Les « poids lourds » (enfin, c’est ainsi qu’on les nomme dans la presse) sont Lecornu (UMP), Le Maire (UMP), Darmanin (UMP), Catherine Vautrin (UMP, « manif pour tous »), Amélie Oudéa-Castera (camarade de promo de Macron, famille pognon, hauts fonctionnaires et médiacrates, elle-même haute fonctionnaire passée chez Axa et Carrefour, son parti : le pouvoir), sans oublier Dupont-Moretti (repris de justice par contumace) et Rachida Dati (UMP). Séjourné (Europe et Affaires étrangères), comme Attal vient des strauss-kahniens. Bref, ce gouvernement repose sur une tête d’épingle et montre que Macron, à trois ans et demi de l’élection présidentielle n’a plus aucune carte entre les mains.

Certes, la nomination d’Attal au poste de premier ministre a reçu l’approbation enthousiaste du lobby LGBTQIA+, Libé en tête. Mais comment Attal pourra-t-il conduire l’opération de charme en direction de la « gauche » qui était prévue avec l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution. Cette affaire idiote devait rééquilibrer sur la « gauche », le cours trop à « droite » sur le plan social. Mais comment faire quand la ministre de la Santé est ouvertement hostile à l’IVG ? La nouvelle ministre de l’éducation nationale, drapeau catho de la très chic et très catho institution Stanislas a déjà dilapidé tout le capital de sympathie que s’était attiré Attal pendant son passage météore rue de Grenelle. Elle commence par un gros mensonge sur les raisons pour lesquelles elle a mis ses enfants à « Stan » et une attaque contre l’EN. Elle aurait pu dire « Je suis catho » ou rappeler que Attal sort de l’école alsacienne où la ministre de gauche Najat Vallaud-Belkacem avait mis sa progéniture, ou encore dire que le privé sous contrat fait partie du service public puisqu’il est largement financé par nos impôts et est considéré comme faisait partie du service public de l’éducation (les professeurs sont recrutés par l’EN et inspecté par les IPR). Mais non, cette grosse maline s’embrouille et se brouille dès le début avec l’EN. On peut avoir été haut fonctionnaire, DG à Carrefour (1,6 millions par an), appartenir au gratin de la classe dominante et être bête comme ses pieds.

Darmanin, qui s’était auto-nommé pour rester au ministère de l’Intérieur annonce qu’il n’ira pas au-delà des JO et songe déjà à un autre destin (car la succession de Macron est annoncée et que Attal sera grillé d’ici là – il a été nommé précisément pour être grillé quand les choses sérieuses (de leur point de vue) arriveront. Quant au ministre des Affaires étrangères, il a disparu puisque dans l’intitulé, l’Europe vient avant les Affaires étrangères, histoire de rappeler que, conformément à la doctrine Macron la souveraineté appartient à l’UE.

Les deux « alliés » officiels sont réduits à la portion congrue et Bourlanges (MODEM) a bien failli s’étrangler. Après tout, Bayrou avait déclaré avant la présidentielle de 2017 que Macron, c’était Mammon, et qu’il refuserait de le servir, ce qu’il s’est ensuite empressé de faire. Mais rien de grave : Bayrou occupe une sinécure au « Plan », institution qui pond de temps des rapports dont tout le monde se moque.

Pour terminer, on remarquera que pour conduire cette tâche centrale qu’est la fameuse « transition énergétique », il n’y a même pas de ministre en charge de l’écologie et de l’environnement. Mais là aussi, ce n’est pas bien grave, puisque de l’écologie, tout le monde s’en fout, à commencer par les écologistes.

Il y a dans tout cela un côté « fin de règne ». Mais la fin de règne n’est pas seulement celle de Macron, mais aussi celle de la Ve République et, et là c’est plus grave, la fin de la France.

Le 15 janvier 2024