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Lorsque « Libération » parle de la Grèce pour viser la France

Hors d’un scénario à la Tsipras et Syriza, Laurent Joffrin nous annonce une catastrophe…

jeudi 28 juin 2018, par Jacques COTTA

A la veille des prochaines élections au parlement européen, l’union européenne est marquée par des chocs successifs qui menacent tout l’édifice. Les dernières manifestations du dégout que l’UE provoque chez les peuples nous conduisent en Italie, après la Pologne ou la Hongrie, après le Brexit, après la Grèce, sans parler de la France, de la Hollande, de l’Irlande… Comment dans ce contexte les européistes de tout poil, de « gauche » comme de « droite », vont-ils bien pouvoir mobiliser alors que le rejet est total. La méthode Coué n’est plus de mise.L’Europe c’était l’emploi, l’Europe c’était la croissance, l’Europe c’était la paix, l’Europe c’était la solidarité, l’Europe c’était le social évidemment, l’Europe c’était aussi la démocratie… L’Européisme béat dont De Gaulle disait dés 1965 « On peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant L’Europe, L’Europe, l’Europe, ça n’aboutit à rien, ça ne signifie rien » repose d’abord sur une escroquerie qui durant des années a permis d’entretenir la confusion. L’UE a été qualifiée d’Europe pour trouver une légitimation naturelle, alors qu’elle n’est qu’une construction politique chargée de défendre les intérêts du capital financier au détriment du travail et des peuples. La concurrence libre et non faussée est dans les gênes de cette construction qui n’a rien à voir avec l’Europe, réalité historique faite de nations et de peuples différents qui chacun ont leur propre histoire.

Les arguments tentant de légitimer la construction européenne en assimilant l’UE à l’Europe ne font plus recette. Pas plus que les invectives contre les opposants à cette « construction européenne » qualifiés à loisir de nationalistes, populistes, égoïstes, et si cela ne suffit pas de lepénistes ou encore de fascistes. La question demeure donc : Comment se faire le chantre de l’Union Européenne face au cataclysme annoncé, produit des traités successifs, de Maastricht à Amsterdam, de Nice à Lisbonne….

Lorsque Laurent Joffrin montre la voie

Laurent Joffrin dans Libération apporte sa réponse. Il nous ramène en Grèce. Evoquant « l’accord qui vient d’être conclu entre l’Europe et la Grèce » il annonce une « conclusion relativement heureuse qui doit beaucoup au courage politique d’un homme, à qui l’histoire rendra un jour justice : Alexis Tsipras ». Bref, La Grèce serait sortie d’affaire. Laurent Joffrin annonce toute de même que « les Grecs ont encore de longues années de souffrance devant eux avant de rétablir leur situation sociale ». Tsipras aurait donc bien fait. Le peuple grec appréciera.

Parler de ce qui attend les grecs ne peut être éclairé que par les affres déjà vécus par un peuple saigné aux quatre veines, avec l’assentiment des différents gouvernements européens rangés derrière l’UE, dont les gouvernements français et allemand, à l’époque respectivement sous la présidence de François Hollande et d’Angela Merkel. Ce sont eux qui ont diligenté la Troïka, la BCE, la CE et le FMI pour imposer un régime austéritaire qui avait valeur de test pour tous les peuples d’Europe. J’ai assisté sur place à certaines des conséquences de la politique imposée à la Grèce. Je m’y trouvais pour le tournage d’un documentaire « dans le secret du crime financier » et ai eu le « loisir » de voir le sort réservé au peuple grec dans tous les domaines. Les écoles fermées fermées pour cause de salaires non payés -comme d’ailleurs la plupart des services publics-, les cantines scolaires dégarnies, les retraites amputées de plus de la moitié, les hôpitaux sans moyen, sans médicaments, sans premiers secours, les associations caritatives, MDM ou autres, prenant le relai comme dans un simple pays du tiers-monde, les communes -parmi les plus importantes- contraintes de déposer le bilan… Et plus encore, un peuple humilié, atteint non seulement dans sa chair mais aussi dans sa fierté…

Tout cela ne serait aujourd’hui qu’une vieille histoire puisque, nous le promettent les éditorialistes, la Grèce serait « sortie d’affaire ». Ils ne se rendent même pas compte de l’absurdité du pronostic à l’heure du grand marasme en préparation.

L’évocation de Tsipras

Au fait, pourquoi tout à coup cet éclat d’admiration pour la Grèce -hier encore coupable de tous les maux européens- et surtout pour son dirigeant, Alexis Tsipras, baptisé pour l’occasion « le valeureux ». Tsipras qui contrairement à tous ses engagements initiaux à choisi « le compromis avec Bruxelles » et a permis nous dit-on, d’éviter « à son peuple des épreuves encore plus terrible » qui seraient survenues après une rupture avec l’euro.

Nous y voila !

Le sens de tout ce laïus n’a que faire de la Grèce et de Tsipras. En réalité, c’est la peur de voir demain des peuples reconquérir leur souveraineté politique, économique, monétaire, qui pousse ainsi nos éditorialistes dont Joffrin à ce retour en arrière.

Et parlant de la Grèce, notre éditorialiste s’adresse à tous ceux qui seraient tentés de ne pas « choisir le moindre mal » comme il dit, « le compromis avec Bruxelles ».

Dans son viseur il y a évidemment tous ceux qui sont habituellement qualifiés avec mépris de souverainistes, de nationalistes, comme si la volonté de demeurer maitre chez soi dans les domaines essentiels que sont la souveraineté industrielle, la souveraineté alimentaire, la souveraineté monétaire étaient par principe coupables. Ceux là sont évidemment dans le viseur des serviteurs de Bruxelles, aujourd’hui comme ils l’étaient hier. L’inquiétude est ailleurs. Elle concerne les peuples qu’il s’agirait de mettre en garde. Elle concerne les forces qui ont affirmé, contrairement au passé, la remise en cause de l’UE. Tsipras avait porté un coup terrible au peuple grec en se couchant devant Merkel, Hollande et l’UE contrairement à ses engagement. Un coup terrible aussi à tous les peuples d’Europe en laissant penser que quoi qu’il arrive, rien n’est possible hors de l’UE. Ce que demande Joffrin entre les lignes, c’est la rentrée dans le rang de tous ceux pour qui le non respect d’un plan A -la remise en cause de traités contraires aux intérêts nationaux- serait synonyme de l’abandon d’un plan B, la remise en question de l’UE, de l’euro, et la reconquête de l’indépendance nationale. En parlant de la Grèce, c’est la France qu’il désigne. « Critiquez, condamnez autant que vous le voudrez, mais restez sous le joug de Bruxelles » dit-il en substance…

Changer l’Europe ?La critique politique, sociale, démocratique se conclut souvent par ce voeu pieux : « il faut changer l’Europe ». L’expression se veut rassurante. Mais l’expression n’est-elle pas trompeuse et porteuse de grande confusion. Car changer signifie qu’il existe un point de départ, en l’occurrence l’UE. Et là, de rassurante, l’expression devient franchement inquiétante. L’UE serait amendable ? Elle serait changeable ? Son histoire, ses traités, ses objectifs seraient modifiables ? Faudrait-il par exemple repartir, comme le font d’ailleurs l’ancienne gauche du PS, Générations, ou l’actuelle, pour un changement dans le sens d’une « Europe sociale ». Rappelons-nous, il y a des années déjà, le slogan « l’Europe sociale, c’est maintenant »… Ou faudrait-il au nom de « changer l’Europe » enfourcher le nouveau cheval à la mode, « l’Europe de l’harmonisation fiscale » ?

En réalité pourquoi parler de « changer » lorsqu’il s’agit de réaffirmer. Réaffirmer l’Europe telle qu’elle devrait être, l’Europe des nations libres décidant de coopérer librement entre elles pour leurs intérêts communs. L’union libre sur les principes de paix qui exigent donc la sortie de l’OTAN, l’abandon et la condamnation de toutes les variations sur le thème de l’Europe de la défense qui n’est autre que la préparation d’une Europe de la guerre. L’union libre répondant aux exigences de liberté. La liberté politique mais aussi économique qui passe par la rupture avec l’Euro, véritable carcan, et sa transformation de monnaie unique en monnaie commune, permettant donc à chaque nation de retrouver sa souveraineté monétaire et à chaque pays de retrouver une monnaie qui lui soit propre, gérée en fonction de son développement économique et non en fonction des intérêts du seul capital financier. La liberté économique qui à l’image d’Airbus hier devrait donner la possibilité de mettre en place des coopérations industrielles, agricoles ou écologiques entre nations qui décideraient librement de s’y engager. L’union libre permettant d’établir l’égalité dans les relations, dans les coopérations, dans la reconnaissance de la souveraineté des peuples, de tous les peuples, de leur droit à décider pour eux-mêmes de leur propre destinée…

De tels objectifs correspondant à la volonté populaire, exprimée à chaque occasion ici ou là, nécessitent un large rassemblement . Mais pour exister celui-ci n’exige t’il pas des réponses politiques claires qu’il s’agit de formuler sur quelques préoccupations simples, en rupture avec des clivages « gauche-droite » plus artificiels que réels…

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