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Violence policière, voyoucratie et injustice sociale

Floyd, Traoré : sortir des confusions et déterminer les raisons du chaos

samedi 6 juin 2020, par Denis COLLIN

Le meurtre de George Floyd par un policier de Minneapolis a déclenché un véritable séisme aux États-Unis, un mouvement que les réactions de Trump, aussi violentes et dénuées de sens que de coutume ont alimenté. Les États-Unis ont vraiment beaucoup de mal à sortir de leur passé structurellement raciste, de ce traumatisme originel qui consiste à s’émanciper en affirmant la liberté et l’égalité de tous les hommes et à entériner dans le même temps l’une des pires abominations de l’histoire humaine, l’esclavage des Noirs. Il y aurait beaucoup de choses à dire sur cette histoire, dans laquelle toutes les civilisations ont pris part – il suffirait d’évoquer la plus terrible des traites négrières, celle qu’ont organisée les Arabes et dont certains vestiges subsistent en quelques lieux (Mauritanie, Libye). Je me contente de rappeler que le racisme est autre chose que la simple méfiance et les simples préjugés à l’égard des gens qui ne sont pas « comme nous ». Il est ancré dans les rapports d’exploitation et dans cette forme particulière d’exploitation qu’est l’esclavage. Pour maintenir l’estime de soi, le défenseur direct ou indirect de l’esclavage doit exclure de la pleine humanité celui qui est réduit en esclavage. Séparer le racisme de ses conditions sociales, c’est finalement l’accepter et quitte à être franchement archaïque, rappelons qu’Angela Davis, en 1975 affirmait à juste titre qu’on ne peut se débarrasser du racisme qu’en supprimant le capitalisme – qu’aujourd’hui Angela Davis dise pas mal de bêtises ne change rien à la justesse de cette affirmation de la jeune communiste qu’elle était.

L’importation du mouvement américain en France sous l’impulsion de toutes sortes de mouvements « indigénistes » est un autre affaire. Elle est typique du fait que, pour ces milieux, le modèle est à tous égards le modèle américain, si paradoxal que cela paraisse. Elle est aussi typique de l’influence de ces intellectuels petits-bourgeois qui ont fait du « petit Blanc » leur ennemi principal et cherchent tous les moyens possibles pour promouvoir leur propre carrière médiatique. La dernière en date est l’intervention de Mme Virginie dite Despentes, écrivain déplorable et méchante femme, soutenue par France-Inter et le sieur Augustin Trapenard…

L’affaire Adama Traoré est entre les mains de la justice et, normalement, c’est à la justice de trancher pour savoir si les policiers sont bien les responsables de la mort du jeune homme. L’enquête clôturée une première fois en déchargeant les forces de l’ordre de toute responsabilité est rouverte en 2019. La justice ne se presse guère ! Voilà le principal reproche qu’on peut lui faire. Pour condamner les Gilets Jaunes elle a fait preuve d’une plus grande célérité : un seul verdict, « Au trou ! » Ici, on tergiverse, on fait traîner en longueur. Adama Traoré n’est pas un saint, c’est même un petit voyou mais la police ne peut pas appliquer la peine de mort de son propre chef ! Donc savoir ce qui s’est vraiment passé est de la plus haute importance. C’est une question non seulement de justice mais aussi d’ordre public.
Les manifestations initiées par le comité Adama Traoré ont rencontré un certain succès pour deux raisons essentielles : 1° la violence de la police est devenue une règle et donc plus personne ne croit les policiers innocents. 2° le racisme endémique persiste dans notre société comme partout ailleurs et l’État laisse pourrir la situation de nombreux « quartiers » devenus des zones de non-droit, qui donnent matière à tous les discours haineux. Dès 2002, un certain Nicolas Sarkozy a entrepris de transformer les forces de l’ordre en bandes armées, couvrant à l’avance toutes les bavures. Sa responsabilité est considérable dans la dégradation de la moralité de la police autant que des relations entre la police et la population. Les successeurs de Sarkozy portent la responsabilité de n’avoir rien fait pour enrayer ces dérives dangereuses et Castaner a porté tout cela à son point d’incandescence.

Donc le problème n’est ni le « racisme d’État » ni je-ne-sais quel « colonialisme ». Les anticolonialistes en l’absence de colonialisme, comme les antifascistes en l’absence de fascisme sont seulement de sinistres pitres qui exploitent la situation à leur profit. Le problème, c’est la situation sociale du pays. D’un certain point de vue, la police n’est pas raciste. Elle s’est montrée bien plus violente envers les Gilets Jaunes qu’envers quiconque d’autre et pourtant les Gilets Jaunes étaient massivement des bons Français moyens ! Cela leur a été assez reproché… Ils ne faisaient pas de bonnes victimes présentables. Les « belles gens » aiment les Noirs à condition qu’ils jouent convenablement leur rôle de victimes. Le problème est que les gouvernements successifs, depuis Sarkozy, ont laissé s’organiser un noyautage fascisant de la police par certains groupes bien connus, parce que transformer la police républicaine en milices spécialisées dans la lutte contre le peuple fait partie de leur stratégie. C’est d’ailleurs pour cette raison que le fascisme à l’ancienne est rigoureusement inutile à la bourgeoisie. Ils ont tout ce qui leur faut à la maison.
Peut-on encore entendre raison dans cette maison de fous que notre pays est en train de devenir ?

Denis Collin – le 6 juin 2020.

Messages

  • Bravo pour cette lucidité dont nous avons plus que besoin. Un pouvoir qui ne se maintient que par la ruse et par la force n’a rien à craindre de ceux qui s’agitent ponctuellement contre l’injustice sans en désigner la source. L’appareil d’État est pleinement au service de l’homme mis en place par les puissances financières. La violence policière en est la conséquence directe, et non je ne sais quelle fatalité inhérente à la fonction, car cette fonction de police républicaine nous est indispensable. Le chœur des vierges offensées des chaines TV en continu a déjà réussi à transformer la lutte du personnel hospitalier en séquence vespérale d’attendrissement sans conséquence. Nul doute qu’il ne s’emploie à exorciser la vraie violence d’État, prête à étouffer tout mouvement social, par une incantation obamesque sur la fraternité opposée aux brebis galeuses des BAC...

  • Depuis plus d’un mois les marchés boursiers continuent de battre des records à la hausse, et pendant ce temps là les émeutiers déboulonnent des statues… la propagande gouvernementale française incitent les déconfinés à allez voter, à partir en vacances et à consommés à fond la caisse… va comprendre !
    PS l’effondrement économique sera catastrophique, et déboulonner des statues n’aura aucun effet sur la misère

  • D’accord sur le fond. Une correction à apporter cependant, de pure forme, avant que des malveillants ne s’en emparent :
    Citation : ’’ Adama Traoré n’est pas un saint, c’est même un petit voyou mais la police ne peut pas appli­quer la peine de mort de son propre chef ! ’’ Aïe ! aïe ! Connaissez-vous, camarade Denis Collin, une institution qui soit légitime, dans notre pays, à appliquer la peine de mort ? A supposer que la peine de mort n’y pas été abolie, devrait-elle s’appliquer à ’’un petit voyou’’ ?
    Il conviendrait de corriger cette erreur de formulation avant que des malveillants ne s’en emparent et la versent au fond, allant peut-être jusqu’à évoquer le retour du refoulé ou quelque chose comme ça.
    Fred R

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